«
LA
MONDIALISATION :
HORREUR
OU CHANCE ? »
Pierre LE ROY,
Directeur de la revue GLOBECO, ancien Directeur Général
d’UNIGRAINS
( ci-dessous un résumé
à partir des notes prises au cours de l’exposé et de la
discussion)
Quelqu'un, je ne sais plus
qui, a dit
« On peut aimer son époque ou la détester mais
il sera de plus en plus dangereux de ne pas la comprendre ».
Donc, embarquons nous ensemble dans un petit effort consistant à
essayer de comprendre comment marche la planète avec ses six
milliards d'habitants. Le titre de cette conférence fait
référence évidemment à quelques ouvrages,
en particulier au livre de Vivian FORESTER intitulé
« L'HORREUR ECONOMIQUE », vendu
à quelques centaines de milliers d'exemplaires en France et
traduit dans vingt cinq ou trente langues. En face d'autres
défendent la théorie inverse, notamment Alain MINC qui a
publié en réponse un autre ouvrage appelé
« LA MONDIALISATION HEUREUSE » puis un article
dans LE MONDE, sous le titre : « LA
MONDIALISATION HEUREUSE : JE PERSISTE ET SIGNE », suivi de
la réponse d’un dirigeant d'ATTAC et d’ une difficile
synthèse des deux articles par un éditorialiste du
journal
Sur ce sujet il y des débats, ce qui est normal et
intéressant mais il y a quand même de façon assez
dominante, l'idée selon laquelle la mondialisation à soi
toute seule est mauvaise, qu’il faut la tempérer, l'organiser,
l'humaniser, parce que ce serait difficile de la supprimer.
Alors, je vais organiser mon exposé en trois parties. La
première va essayer d’expliquer de façon peut-être
un peu plus précise ce qu’est la mondialisation. Puis une
deuxième partie examinera les critiques qui lui sont faites.
Enfin, dans un troisième temps, je présenterai les
arguments en sa faveur.
QU’EST-CE QUE LA MONDIALISATION ?
Il y a dix ans le terme existait sans doute, mais n'était pas un
sujet de débat, peut-être un sujet d'expert. Dans les
années 94/95 - Directeur général d'UNIGRAINS
à l'époque – j’ai pensé que le thème de la
mondialisation était sans doute parmi ceux qui seraient les plus
discutés dans les années suivantes et j'ai monté
une revue appelée : « GLOBECO » qui
publie des dossiers sur les grands sujets qui font débat au
niveau mondial. A force de travailler et d’enregistrer un certain
nombre d'informations, j'ai bâti un indice de la mondialisation
avec un indice du bonheur mondial et un indice de la fracture mondiale
L’INDICE DE MONDIALISATION
Comment peut on donc définir la mondialisation à partir
de quelques éléments significatifs ? D'abord,
définition globale et simple, peut-être un peu
caricaturale, l'essentiel c'est la disparition des frontières.
Pour aller un peu plus loin, j'ai choisi les 6 éléments
suivants :
1° Le commerce international des biens et des services par rapport
au PIB mondial quantifié tous les ans par le Programme des
Nations Unies pour le Développement (PNUD). Le PNUD chiffrait en
1998 à 23,3 % le rapport entre le commerce international des
biens et des services et le PIB mondial et à 27 % 1999 :
augmentation considérable de 4 % en un an.
2° Les voyages internationaux : l'organisation de l'aviation
internationale l'OACI publie des chiffres tous les ans le nombre de
voyageurs internationaux par avion à rapporter au nombre total
de voyageurs.
3° Les investissements directs à l'étranger par
rapport aux investissements totaux données statistiques qui sont
calculées tous les ans par la Banque Mondiale.
4 ° Le chiffre d’affaires des 100 premières entreprises
mondiales par rapport au PIB mondial. Au cours des 5 dernières
années, la part des 100 premières entreprises mondiales
(d’après le journal anglo-saxon FORTUNE ) par rapport au PIB
mondial augmente tous les ans en moyenne de 1 ou 2 points : un peu
moins de 20% il y a 5 ans, pas loin de 25 % à l'heure actuelle.
A ce rythme là, dans 30 ou 40 ans, les 100 premières
entreprises mondiales feront 40 ou 50 % du PIB mondial. Est-ce bien
raisonnable ?
5° Le nombre de pays qui adhérent à l'OMC. L'OMC est
critiquée par tout le monde mais tous les pays veulent y
adhérer. Est-ce que l'OMC sera à la hauteur de tous les
problèmes et aura le courage, par exemple, de condamner des
USA pour avoir mis des droits de douane sur l'acier.
6° Le nombre d'internautes dans le monde, publié par l'Union
internationale des Télécommunications et qui a facilement
doublé au cours de la dernière année.
Par rapport au niveau 100 de l’année précédente,
les augmentations sont les suivantes:
Commerce mondial : 15,88 %.
Voyages internationaux : 4,81 %.
Investissements directs à l’étranger : 43,66 %, ce
qui est considérable !
Chiffre d’affaires des 100 premières entreprises
mondiales : 5,40 %
L'OMC : 2,14 % ( de 140 à membres à 143 membres )
Le nombre d'internautes dans le monde : 49,14 %
. La moyenne des 6 critères c'est 20 % d'augmentation de
l'indice de la mondialisation défini comme je vous l'ai
indiqué, avec sûrement des critiques possibles, des
oublis, mais c'est considérable.
. Avec six éléments, sûrement critiquables et
incomplets mais dont je pense qu'ils sont quelque peu fondateurs et
significatifs de la mondialisation, celle-ci, en un an, a
progressé d’un peu plus de 20%. C'est énorme, c'est un
rythme de doublement tous les 3 ou 4 ans, bien que ce rythme risque
d’être un peu plus faible dans un an à cause des
événements du 11 septembre et de la moindre progression
de l'économie mondiale.
LES
EFFETS
NEFASTES
DE LA MONDIALISATION
Quelles sont les critiques qui sont faites
à la mondialisation ou plutôt à ses
conséquences ?
Elles sont de trois types: premièrement elle est un facteur de
chômage, deuxièmement elle est un facteur
d'inégalité croissante mondialement et peut-être
aussi à l'intérieur des pays, troisièmement elle
est un facteur d'uniformisation en particulier culturel.
1° La mondialisation est-elle un
facteur de chômage ?
Un Américain, Robert REICH, ministre du travail du premier
gouvernement Clinton et professeur de faculté, a écrit un
livre intitulé « Economie
Mondialisée » dans lequel il essaie de
répondre à la question : est ce que le
mondialisation tue l'emploi, notamment dans les pays
développés ? Sa réponse est plutôt
pessimiste. Pour les USA en 1992, mais sous-entendu pour l'ensemble des
pays développés, il distingue trois types d'emplois et
d’employés dans le monde qu’il compare à trois
bateau :
les travailleurs routiniers, ce sont les gens qui font toujours la
même chose, sans beaucoup de qualification, sans beaucoup de
valeur ajoutée, avec de faibles salaires
Leur bateau coule rapidement parce que la main-d’œuvre coûte cher
et entraîne le mouvement des investisseurs qui se
délocalisent de pays en pays suivant le moindre coût de la
main d’œuvre et des charges, c'est ce qu'on appelle le vol des oies
sauvages. Le seul continent oublié, évidemment,
hélas ! C’est l'Afrique sub-saharienne.
Les services aux personnes : les infirmières, les gardiens
de nuit, les services aux personnes âgées, les femmes de
ménages, la sécurité...
Ce bateau coule aussi mais lentement. Pourquoi coule-t’il ? Parce qu’on
peut faire venir de la main d’œuvre à bon marché dans les
pays riches. Et pourquoi coule-t-il lentement ? Parce qu'il se
crée beaucoup d’emplois dans ce domaine
les manipulateurs de symboles, - traduisons plutôt les
utilisateurs de symboles puisque que manipuler en français a un
sens péjoratif- ce sont premièrement les gens qui sont
capables d'analyser des problèmes complexes, deuxièmement
ceux qui sont aptes à les résoudre et
troisièmement ceux qui savent mettre en rapport ceux qui posent
des problèmes et ceux qui les résolvent
Ils représentent l'avenir pour les pays développés
tant que les pays pauvres ne seront pas capables eux aussi d'avoir
leurs utilisateurs de symboles, mais cela commence, en Inde par
exemple, des gens sont capables de faire des logiciels aussi bien que
nous; Et donc, ce bateau coule aussi mais très, très
lentement
De ces trois catégories, quelle synthèse peut-on
faire ? Quand une entreprise délocalise, est-ce uniquement
pour avoir de la main d’œuvre moins chère ou est-ce aussi parce
que les marchés sont à l'étranger. Nous sommes 1
milliard dans les pays développés et presque tous en
baisse potentielle de population dans les 20 ou 30 ans qui viennent. Il
y a 5 milliards de personnes dans les pays en développement et
l'augmentation de la population dans les 20, 30 ans prochains, se fera
essentiellement dans ces pays Autrement dit, le marché n’est
plus chez nous, quantitativement en tout cas.. Alors la conclusion,
c'est que dans les pays développés il y a un
problème de modification de l'emploi mais que cette modification
n’est peut-être pas est défavorable aux pays en
développement Autrement dit, la mondialisation est pour les pays
développés une difficulté, pour les pays en
développement peut être une chance ?
2° La mondialisation accroît-elle
la fracture mondiale
Pour tenter mesurer la fracture mondiale , j’ai choisi de comparer
la situation du milliard de riches à celle du milliard de
pauvres. Le milliard de riches, ce sont, en gros, les pays de l'OCDE,
plus quelques autres, 28 pays en tout, je crois. Le milliard de
pauvres, ce sont les habitants des 50 pays les plus pauvres. Attention,
n’oublions pas qu’il y a des pauvres chez les riches, comme il y a des
riches chez les pauvres ! Mais je prends la totalité des
habitants des pays riches, et j'appelle ça le milliard de
riches, et la totalité des habitants des pays pauvres et
j'appelle ça le milliard de pauvres. La comparaison année
après année pourra être faite au bout de 4, 5 ou 10
ans, avec un indice composé des 10 éléments
suivants :
1° le PIB moyen par tête, rapport de 1 à 20 !
2° la recherche développement, c'est à dire la
dépense intérieure de recherche, rapport de 1 à
170 ! bien qu’en amélioration, c’est un écart
colossal quant à la préparation de l’avenir
3° l'espérance de vie à la naissance, avec une
dégradation terrible dans les pays pauvres à cause du
SIDA
4° le taux de scolarisation des enfants, à peu près
pareil d'une année sur l'autre,
5° le taux d’ alphabétisation des adultes, évolution
peu significative.
6° la consommation de calories
7° le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans,. chez
les riches : 6 pour 1000,chez les pauvres : 82 pour 1000,
mais en légère amélioration.
8° la situation des femmes par rapport aux hommes,
9° la fracture culturelle, c'est à dire le nombre de postes
de radios et de télévision - l'UNESCO a peu de
statistiques sur les journaux- fortement amélioré.
10° la fracture digitale, les téléphones, les
téléphone mobiles, l'Internet et les PC, la fracture
digitale est énorme, mais elle diminue..
La synthèse de ces critères donne une fracture mondiale
en augmentation de 3% en 1 an. Mais peut-on dire, par exemple, que le
SIDA, responsable de 50 % de la mortalité infantile est une
conséquence de la mondialisation ? Les inégalités
sont augmentation. Est-ce du à la mondialisation, sans doute
mais peut-être pas à 100 %.
3° La mondialisation entraine-t’elle
une uniformisation, notamment culturelle ?
A l'heure actuelle, je dirige une association qui s'appelle PLURI AGRI
regroupant des organisations professionnelles agricoles avec des
organismes de recherche et les pouvoirs publics pour inciter à
la création de modèles sur les marches mondiaux à
long terme. Car les Américains sont maîtres du jeu dans ce
domaine et nous voulons réagir et avoir des instruments propres
à la France, sinon à l'Europe sur ces sujets. Nous allons
publier un petit ouvrage intitulé : « Comment
jouerons-nous demain horizon 2010 », sur le plan
quantitatif, c'est à dire les prévisions d'offres et de
demandes et sur le plan qualitatif
Il y a une certaine uniformisation en matière de semences, en
matière végétale, en matière de races
animales sans doute pour des raisons économiques. Par contre,
peut-on dire que la mondialisation est facteur d'uniformisation en
matière de nourriture, je ne le crois pas. Allez dans n'importe
quel supermarché de n'importe quelle ville de n'importe quel
pays du monde, vous n'avez jamais eu autant de diversité
alimentaire venant du monde entier, la nourriture occidentale
pénètre dans les autres pays et la nourriture des autres
pays pénètre chez nous , c'est un métissage qui
n’est pas mauvais en soi.
Sur le plan culturel, les médias ont diffusé et
brassé un folklore mondial à partir de cultures
différentes Il y a un folklore planétaire enrichi
d’intégrations et de rencontres dans l’art, la musique, la
littérature, la pensée. La mondialisation culturelle
n'est pas uniformisante mais favorise l'expression des
originalités nationales en son sein. C’est en
résumé, ce qu’écrivait Edgard MORIN dans LE MONDE.
LES
ASPECTS
POSITIFS
DE LA MONDIALISATION
D’abord on ne peut pas dire que tous les
maux du monde soit dus à la mondialisation. La diminution de
l'espérance de vie à la naissance, en Russie, est-elle
vraiment la conséquence de la mondialisation ou de la vodka, du
passage trop rapide, sur le plan économique, à un
capitalisme ultra-libéral ? le SIDA est actif en Afrique du
Sud et au Zimbabwe mais pas du tout au Sénégal, est-ce du
à la mondialisation. La mondialisation n’est pas à
l'origine de tous les maux, mais plutôt à l'origine de
grandes adaptations extrêmement douloureuses.
Deuxièmement, il faut bien que
l'emploi aille chez les pauvres, quels autres moyens les pauvres ont
pour s'enrichir ? De plus, c'est chez eux que se trouvent nos
marchés futurs. A qui vendront nous nos marchandises si les
pauvres ne s'enrichissent pas ? Notre générosité
rejoint aussi notre intérêt. Mais d'un autre coté
si vous dites à des ouvriers qui viennent de perdre leur emploi,
qui ont 50 ans et pas beaucoup de formation, qu'à cause de la
mondialisation, leurs usines vont aller en Chine et que c'est une bonne
chose, pour l'humanité, c’est extrêmement difficile
à analyser, à juger, à expliquer et
peut-être même à comprendre.
Ensuite, il faut reconnaître que la
mondialisation a apporté aussi des améliorations. La
Chine est le pays du monde, qui a connu peut-être le plus de
famines dans l'histoire. Or le fait que la Chine ait
développé son agriculture par des moyens modernes a
permis à l'économie chinoise de se développer de 8
à 10 % par an. Les Chinois au rythme actuel de
développement auront un PIB entre 2020 et 2025 équivalent
du PIB des Etats Unis, soit par tête plus de 10.000 dollars.
C’est le niveau qu'avait le Portugal et la Grèce quand ils ont
adhéré à l'Union Européenne et c'est le
niveau que le PNUD, le Programme des Nations Unis pour le
Développement met comme entre la pauvreté et la richesse.
Et cela par l'ouverture au monde, grâce à des
investissements étrangers, grâce à des technologies
étrangères, grâce peut-être demain à
l'adhésion de l'OMC.
QUELQUES ELEMENTS DE PROSPECTIVE
Il y a un milliard de riches et la
population elle augmente. Où? Chez les pauvres. Donc il y
devrait y avoir plus de pauvres demain puisque la population augmente
chez les pauvres et que la mondialisation augmente la fracture
mondiale. Mais soyons optimistes, en gros, vers 2010-2015, avec 3% de
croissance mondiale annuelle -il n'y pas de raisons de penser que ce
sera moins, sauf catastrophes imprévisibles- il y aura
près 1 milliard d'habitants supplémentaires qui seront
à 10.000 dollars, 90 % de scolarisation et
d'alphabétisation et au moins 70 ans d'espérance de vie
à la naissance, c'est le développement humain
élevé du milliard de riches. Où sont-ils ?
Essentiellement en Europe de l'Est, dans quelques pays
d'Amérique du Sud, en Malaisie … 1 milliard de riches à
l'heure actuelle sur 6 milliards d’habitants, c'est plus de 15 %.
Dans 15 ans, 1 milliard de plus fera 2
milliards sur 6,6 milliards au total, soit 30 % c'est quand même
une bonne nouvelle. Vers 2020-2025, c'est la vague chinoise qui va
arriver à 10 000 dollars par tête. Autrement dit, 1,5
milliard de personnes. Avec quelques pays en plus, la Russie et les
pays du Maghreb, vraisemblablement, on peut espérer 2 milliards.
2 plus 2 = 4 milliards sur 7,3 ou 7,4 milliards d'habitants, soit plus
de 50%.
Il y aura ensuite la vague indienne, encore 1 milliard ou 1,5 milliard,
avec d'autres pays et du coup on atteindra 6 milliards sur 8, à
peu près 75 %.
Evidemment la dernière vague ce sera
l'Afrique Subsaharienne avec d'autres pays comme l'Afghanistan, le
Pakistan, le Bangladesh, le Népal, Haïti, les derniers
galériens de cette planète, les pauvres parmi les
pauvres, pays les moins avancés.
On se demande comment ces pays et leurs habitants pourront sortir de la
misère. Le meilleur moyen serait, si ce n’est pas
déjà trop tard, de développer leur agriculture
à l’exemple de la Chine qui a développé son
économie, c'est parce que son agriculture s'est
développée avec des modes de production à
l'occidentale, des exploitations quasi familiales, des baux à
long terme une augmentation des prix de 50 %. Résultat en 5 ans,
il y a eu 50 % d'augmentation de la production agricole et les famines
ont presque disparu. Hélas, c'est pas le chemin qui a
été suivi par beaucoup de pays qui ont choisi des
priorités industrielles considérées comme plus
modernes, comme plus novatrices.
Mais ça ne veut pas dire que le meilleur moyen de
développer l'agriculture de ces pays soit de rester à 40
ou 50 % de population paysanne. Robert Reich dans ses études ne
prend que 80% de la population active américaine, il exclut les
fonctionnaires et les agriculteurs, donc on ne saura jamais si les
agriculteurs sont des travailleurs routiniers. Je ne le crois pas.
DISCUSSION
Question : la mondialisation n'est-elle pas
un phénomène qui remonte à la nuit des temps ?
Deuxièmement, n’êtes vous pas un peu optimiste quant
à l'enrichissement des gens et n’envisagez-vous pas une
croissance démographique du monde très faible. Est ce
qu'il n'y a pas quand même un risque d'explosion sociale
sous-jacent à travers le monde entre les gens dits riches et les
gens dits pauvres ?
P L : La mondialisation est devenue un sujet de débat, cela ne
veut pas dire qu’elle n’existait auparavant. Mais à l'heure
actuelle, il y a bien une généralisation progressive, une
accélération par les facilités de voyages, les
facilités de communications mondiales en
quasi-instantanéité, la disparition progressive des
droits de douane, la place grandissante les grandes entreprises
mondialisées… qui me font penser que la mondialisation est quand
même plus forte et plus influente dans le monde actuel qu'elle ne
l'était . Les deux guerres mondiales ont brisé la
mondialisation dans le passé, d’où la crise de 36. Alors
la mondialisation peut être brisée dans les années
qui viennent soit par une crise mondiale de l'économie, soit des
conflits mondiaux
Est-ce que tout cela ne va pas finir par des explosions sociales ?
Possible. C'est pour cela que notre intérêt est
d'être un peu plus généreux. Si j'ai raison, le
nombre les pauvres va diminuer mais cela n'empêchera pas la
fracture mondiale de continuer à augmenter.
Arrêtons-nous à la
démographie car on peut en dire des choses relativement
nouvelles. Les démographes pensent à l'heure actuelle,
c'est que nous ne sommes plus dans la période de l'explosion
démographique. Le taux de renouvellement de la population, c'est
un taux de fécondité des femmes de 2,1. Dans les pays
développés, il n'y a plus que 2 ou 3 pays qui sont
au-delà. Le taux mondial de fécondité des femmes
au cours des 40 ou 50 dernières années a baissé de
moitié. Il est passé d'un peu plus de 7 à un peu
plus de 3,5. Si dans les années qui viennent les taux de
fécondité des femmes dans les pays
développés et dans les pays en développement
évoluaient comme dans les 40 dernières année, il
n'y aurait plus aucun habitant dans les pays développés
vers 2350 et plus personne sur la terre en 2500 ! En 1990 le taux
d'augmentation de la population mondiale a été au
maximum, 90 millions par an., nous sommes à l’heure actuelle 75
et on va vers 60, puis vers 50, puis vers 40.
En 2050, la population mondiale plafonnera entre 8, 5 et 9 milliards et
diminuera ensuite, sauf si on arrive à faire remonter le taux de
fécondité des femmes.
Question: Vous avez chiffré le développement en dollars
et si on le chiffrait en calories Les calories actuellement
proviennent du pétrole ou du charbon, denrées
épuisables et qui augmentent le taux de CO2. Quelles
énergies de remplacement peut-on envisager.
P. L. Quelles énergies pour demain ? Le pétrole n’est pas
inépuisable, même si tous les ans on en découvre de
nouveaux gisements et on découvre du gaz naturel. Le charbon
comme le pétrole, ça pollue. Les énergies
renouvelables ne semblent pas très prometteuses : les
éoliennes font du bruit et dénaturent le paysage! Donc si
on ne veut pas de pétrole, si on ne veut pas de charbon, si on
ne veut pas de nucléaire, si on ne veut pas d'énergie
renouvelable, si on veut pas de grands barrages, que faire ? A mon
avis, ce ne sont pas des accords internationaux du genre Kyoto qui vont
régler le problème, pour une raison simple, c'est que
personne ne les appliquera, parce que l'intérêt national
est toujours plus fort que la générosité et
l'intelligence internationale. Donc je crois qu’il faut compter sur les
progrès techniques et scientifiques pour régler de gros
problèmes.
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