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Conférence        2002



«   LA MONDIALISATION : HORREUR OU CHANCE ? »
Pierre LE ROY,

Directeur de la revue GLOBECO, ancien Directeur Général d’UNIGRAINS
( ci-dessous un résumé à partir des notes prises au cours de l’exposé et de la discussion)
Qu'est-ce que la mondialisation?
Les effets néfastes de la mondialisation
Les aspects positifs de la mondialisation
Quelques éléments de prospective
Discussion
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Quelqu'un, je ne sais plus qui, a dit « On peut aimer son époque ou la détester mais il sera de plus en plus dangereux de ne pas la comprendre ». Donc, embarquons nous ensemble dans un petit effort consistant à essayer de comprendre comment marche la planète avec ses six milliards d'habitants. Le titre de cette conférence fait référence évidemment à quelques ouvrages, en particulier au livre de Vivian FORESTER intitulé « L'HORREUR ECONOMIQUE  », vendu à quelques centaines de milliers d'exemplaires en France et traduit dans vingt cinq ou trente langues. En face d'autres défendent la théorie inverse, notamment Alain MINC qui a publié en réponse un autre ouvrage appelé « LA MONDIALISATION HEUREUSE » puis un article dans LE MONDE, sous le titre : «  LA MONDIALISATION HEUREUSE : JE PERSISTE ET SIGNE », suivi de la réponse d’un dirigeant d'ATTAC et d’ une difficile synthèse des deux articles par un éditorialiste du journal
Sur ce sujet il y des débats, ce qui est normal et intéressant mais il y a quand même de façon assez dominante, l'idée selon laquelle la mondialisation à soi toute seule est mauvaise, qu’il faut la tempérer, l'organiser, l'humaniser, parce que ce serait difficile de la supprimer.
Alors, je vais organiser mon exposé en trois parties. La première va essayer d’expliquer de façon peut-être un peu plus précise ce qu’est la mondialisation. Puis une deuxième partie examinera les critiques qui lui sont faites. Enfin, dans un troisième temps, je présenterai les arguments en sa faveur.

QU’EST-CE QUE LA MONDIALISATION ?
Il y a dix ans le terme existait sans doute, mais n'était pas un sujet de débat, peut-être un sujet d'expert. Dans les années 94/95 - Directeur général d'UNIGRAINS à l'époque – j’ai pensé que le thème de la mondialisation était sans doute parmi ceux qui seraient les plus discutés dans les années suivantes et j'ai monté une revue appelée : «  GLOBECO » qui publie des dossiers sur les grands sujets qui font débat au niveau mondial. A force de travailler et d’enregistrer un certain nombre d'informations, j'ai bâti un indice de la mondialisation avec un indice du bonheur mondial et un indice de la fracture mondiale

L’INDICE DE MONDIALISATION
Comment peut on donc définir la mondialisation à partir de quelques éléments significatifs ? D'abord, définition globale et simple, peut-être un peu caricaturale, l'essentiel c'est la disparition des frontières. Pour aller un peu plus loin, j'ai choisi les 6 éléments suivants :
1° Le commerce international des biens et des services par rapport au PIB mondial quantifié tous les ans par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Le PNUD chiffrait en 1998 à 23,3 % le rapport entre le commerce international des biens et des services et le PIB mondial et à 27 % 1999 : augmentation considérable de 4 % en un an.
2° Les voyages internationaux : l'organisation de l'aviation internationale l'OACI publie des chiffres tous les ans le nombre de voyageurs internationaux par avion à rapporter au nombre total de voyageurs.
3° Les investissements directs à l'étranger par rapport aux investissements totaux données statistiques qui sont calculées tous les ans par la Banque Mondiale.
4 ° Le chiffre d’affaires des 100 premières entreprises mondiales par rapport au PIB mondial. Au cours des 5 dernières années, la part des 100 premières entreprises mondiales (d’après le journal anglo-saxon FORTUNE ) par rapport au PIB mondial augmente tous les ans en moyenne de 1 ou 2 points : un peu moins de 20% il y a 5 ans, pas loin de 25 % à l'heure actuelle. A ce rythme là, dans 30 ou 40 ans, les 100 premières entreprises mondiales feront 40 ou 50 % du PIB mondial. Est-ce bien raisonnable ?
5° Le nombre de pays qui adhérent à l'OMC. L'OMC est critiquée par tout le monde mais tous les pays veulent y adhérer. Est-ce que l'OMC sera à la hauteur de tous les problèmes et aura le courage, par exemple, de condamner des USA pour avoir mis des droits de douane sur l'acier.
6° Le nombre d'internautes dans le monde, publié par l'Union internationale des Télécommunications et qui a facilement doublé au cours de la dernière année.
Par rapport au niveau 100 de l’année précédente, les augmentations sont les suivantes:
Commerce mondial : 15,88 %.
Voyages internationaux : 4,81 %.
Investissements directs à l’étranger : 43,66 %, ce qui est considérable !
Chiffre d’affaires des 100 premières entreprises mondiales : 5,40 %
L'OMC : 2,14 % ( de 140 à membres à 143 membres )
Le nombre d'internautes dans le monde : 49,14 %
. La moyenne des 6 critères c'est 20 % d'augmentation de l'indice de la mondialisation défini comme je vous l'ai indiqué, avec sûrement des critiques possibles, des oublis, mais c'est considérable.
. Avec six éléments, sûrement critiquables et incomplets mais dont je pense qu'ils sont quelque peu fondateurs et significatifs de la mondialisation, celle-ci, en un an, a progressé d’un peu plus de 20%. C'est énorme, c'est un rythme de doublement tous les 3 ou 4 ans, bien que ce rythme risque d’être un peu plus faible dans un an à cause des événements du 11 septembre et de la moindre progression de l'économie mondiale.

LES EFFETS NEFASTES DE LA MONDIALISATION

Quelles sont les critiques qui sont faites à la mondialisation ou plutôt à ses conséquences ?
Elles sont de trois types: premièrement elle est un facteur de chômage, deuxièmement elle est un facteur d'inégalité croissante mondialement et peut-être aussi à l'intérieur des pays, troisièmement elle est un facteur d'uniformisation en particulier culturel.

1° La mondialisation est-elle un facteur de chômage ?
Un Américain, Robert REICH, ministre du travail du premier gouvernement Clinton et professeur de faculté, a écrit un livre intitulé « Economie Mondialisée » dans lequel il essaie de répondre à la question : est ce que le mondialisation tue l'emploi, notamment dans les pays développés ? Sa réponse est plutôt pessimiste. Pour les USA en 1992, mais sous-entendu pour l'ensemble des pays développés, il distingue trois types d'emplois et d’employés dans le monde qu’il compare à trois bateau :
les travailleurs routiniers, ce sont les gens qui font toujours la même chose, sans beaucoup de qualification, sans beaucoup de valeur ajoutée, avec de faibles salaires
Leur bateau coule rapidement parce que la main-d’œuvre coûte cher et entraîne le mouvement des investisseurs qui se délocalisent de pays en pays suivant le moindre coût de la main d’œuvre et des charges, c'est ce qu'on appelle le vol des oies sauvages. Le seul continent oublié, évidemment, hélas ! C’est l'Afrique sub-saharienne.
Les services aux personnes : les infirmières, les gardiens de nuit, les services aux personnes âgées, les femmes de ménages, la sécurité...
Ce bateau coule aussi mais lentement. Pourquoi coule-t’il ? Parce qu’on peut faire venir de la main d’œuvre à bon marché dans les pays riches. Et pourquoi coule-t-il lentement ? Parce qu'il se crée beaucoup d’emplois dans ce domaine
les manipulateurs de symboles, - traduisons plutôt les utilisateurs de symboles puisque que manipuler en français a un sens péjoratif- ce sont premièrement les gens qui sont capables d'analyser des problèmes complexes, deuxièmement ceux qui sont aptes à les résoudre et troisièmement ceux qui savent mettre en rapport ceux qui posent des problèmes et ceux qui les résolvent
Ils représentent l'avenir pour les pays développés tant que les pays pauvres ne seront pas capables eux aussi d'avoir leurs utilisateurs de symboles, mais cela commence, en Inde par exemple, des gens sont capables de faire des logiciels aussi bien que nous; Et donc, ce bateau coule aussi mais très, très lentement
De ces trois catégories, quelle synthèse peut-on faire ? Quand une entreprise délocalise, est-ce uniquement pour avoir de la main d’œuvre moins chère ou est-ce aussi parce que les marchés sont à l'étranger. Nous sommes 1 milliard dans les pays développés et presque tous en baisse potentielle de population dans les 20 ou 30 ans qui viennent. Il y a 5 milliards de personnes dans les pays en développement et l'augmentation de la population dans les 20, 30 ans prochains, se fera essentiellement dans ces pays Autrement dit, le marché n’est plus chez nous, quantitativement en tout cas.. Alors la conclusion, c'est que dans les pays développés il y a un problème de modification de l'emploi mais que cette modification n’est peut-être pas est défavorable aux pays en développement Autrement dit, la mondialisation est pour les pays développés une difficulté, pour les pays en développement peut être une chance ?

2° La mondialisation accroît-elle la fracture mondiale
Pour tenter mesurer la fracture mondiale , j’ai choisi de comparer la situation du milliard de riches à celle du milliard de pauvres. Le milliard de riches, ce sont, en gros, les pays de l'OCDE, plus quelques autres, 28 pays en tout, je crois. Le milliard de pauvres, ce sont les habitants des 50 pays les plus pauvres. Attention, n’oublions pas qu’il y a des pauvres chez les riches, comme il y a des riches chez les pauvres ! Mais je prends la totalité des habitants des pays riches, et j'appelle ça le milliard de riches, et la totalité des habitants des pays pauvres et j'appelle ça le milliard de pauvres. La comparaison année après année pourra être faite au bout de 4, 5 ou 10 ans, avec un indice composé des 10 éléments suivants : 
1° le PIB moyen par tête, rapport de 1 à 20 !
2° la recherche développement, c'est à dire la dépense intérieure de recherche, rapport de 1 à 170 ! bien qu’en amélioration, c’est un écart colossal quant à la préparation de l’avenir
3° l'espérance de vie à la naissance, avec une dégradation terrible dans les pays pauvres à cause du SIDA
4° le taux de scolarisation des enfants, à peu près pareil d'une année sur l'autre,
5° le taux d’ alphabétisation des adultes, évolution peu significative.
6° la consommation de calories
7° le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans,. chez les riches : 6 pour 1000,chez les pauvres : 82 pour 1000, mais en légère amélioration.
8° la situation des femmes par rapport aux hommes,
9° la fracture culturelle, c'est à dire le nombre de postes de radios et de télévision - l'UNESCO a peu de statistiques sur les journaux- fortement amélioré.
10° la fracture digitale, les téléphones, les téléphone mobiles, l'Internet et les PC, la fracture digitale est énorme, mais elle diminue..
La synthèse de ces critères donne une fracture mondiale en augmentation de 3% en 1 an. Mais peut-on dire, par exemple, que le SIDA, responsable de 50 % de la mortalité infantile est une conséquence de la mondialisation ? Les inégalités sont augmentation. Est-ce du à la mondialisation, sans doute mais peut-être pas à 100 %.

3° La mondialisation entraine-t’elle une uniformisation, notamment culturelle ?
A l'heure actuelle, je dirige une association qui s'appelle PLURI AGRI regroupant des organisations professionnelles agricoles avec des organismes de recherche et les pouvoirs publics pour inciter à la création de modèles sur les marches mondiaux à long terme. Car les Américains sont maîtres du jeu dans ce domaine et nous voulons réagir et avoir des instruments propres à la France, sinon à l'Europe sur ces sujets. Nous allons publier un petit ouvrage intitulé : « Comment jouerons-nous demain horizon 2010 », sur le plan quantitatif, c'est à dire les prévisions d'offres et de demandes et sur le plan qualitatif
Il y a une certaine uniformisation en matière de semences, en matière végétale, en matière de races animales sans doute pour des raisons économiques. Par contre, peut-on dire que la mondialisation est facteur d'uniformisation en matière de nourriture, je ne le crois pas. Allez dans n'importe quel supermarché de n'importe quelle ville de n'importe quel pays du monde, vous n'avez jamais eu autant de diversité alimentaire venant du monde entier, la nourriture occidentale pénètre dans les autres pays et la nourriture des autres pays pénètre chez nous , c'est un métissage qui n’est pas mauvais en soi.
Sur le plan culturel, les médias ont diffusé et brassé un folklore mondial à partir de cultures différentes Il y a un folklore planétaire enrichi d’intégrations et de rencontres dans l’art, la musique, la littérature, la pensée. La mondialisation culturelle n'est pas uniformisante mais favorise l'expression des originalités nationales en son sein. C’est en résumé, ce qu’écrivait Edgard MORIN dans LE MONDE.

LES ASPECTS POSITIFS DE LA MONDIALISATION

D’abord on ne peut pas dire que tous les maux du monde soit dus à la mondialisation. La diminution de l'espérance de vie à la naissance, en Russie, est-elle vraiment la conséquence de la mondialisation ou de la vodka, du passage trop rapide, sur le plan économique, à un capitalisme ultra-libéral ? le SIDA est actif en Afrique du Sud et au Zimbabwe mais pas du tout au Sénégal, est-ce du à la mondialisation. La mondialisation n’est pas à l'origine de tous les maux, mais plutôt à l'origine de grandes adaptations extrêmement douloureuses.

Deuxièmement, il faut bien que l'emploi aille chez les pauvres, quels autres moyens les pauvres ont pour s'enrichir ? De plus, c'est chez eux que se trouvent nos marchés futurs. A qui vendront nous nos marchandises si les pauvres ne s'enrichissent pas ? Notre générosité rejoint aussi notre intérêt. Mais d'un autre coté si vous dites à des ouvriers qui viennent de perdre leur emploi, qui ont 50 ans et pas beaucoup de formation, qu'à cause de la mondialisation, leurs usines vont aller en Chine et que c'est une bonne chose, pour l'humanité, c’est extrêmement difficile à analyser, à juger, à expliquer et peut-être même à comprendre.

Ensuite, il faut reconnaître que la mondialisation a apporté aussi des améliorations. La Chine est le pays du monde, qui a connu peut-être le plus de famines dans l'histoire. Or le fait que la Chine ait développé son agriculture par des moyens modernes a permis à l'économie chinoise de se développer de 8 à 10 % par an. Les Chinois au rythme actuel de développement auront un PIB entre 2020 et 2025 équivalent du PIB des Etats Unis, soit par tête plus de 10.000 dollars. C’est le niveau qu'avait le Portugal et la Grèce quand ils ont adhéré à l'Union Européenne et c'est le niveau que le PNUD, le Programme des Nations Unis pour le Développement met comme entre la pauvreté et la richesse. Et cela par l'ouverture au monde, grâce à des investissements étrangers, grâce à des technologies étrangères, grâce peut-être demain à l'adhésion de l'OMC. 

QUELQUES ELEMENTS DE PROSPECTIVE

Il y a un milliard de riches et la population elle augmente. Où? Chez les pauvres. Donc il y devrait y avoir plus de pauvres demain puisque la population augmente chez les pauvres et que la mondialisation augmente la fracture mondiale. Mais soyons optimistes, en gros, vers 2010-2015, avec 3% de croissance mondiale annuelle -il n'y pas de raisons de penser que ce sera moins, sauf catastrophes imprévisibles- il y aura près 1 milliard d'habitants supplémentaires qui seront à 10.000 dollars, 90 % de scolarisation et d'alphabétisation et au moins 70 ans d'espérance de vie à la naissance, c'est le développement humain élevé du milliard de riches. Où sont-ils ? Essentiellement en Europe de l'Est, dans quelques pays d'Amérique du Sud, en Malaisie … 1 milliard de riches à l'heure actuelle sur 6 milliards d’habitants, c'est plus de 15 %.

Dans 15 ans, 1 milliard de plus fera 2 milliards sur 6,6 milliards au total, soit 30 % c'est quand même une bonne nouvelle. Vers 2020-2025, c'est la vague chinoise qui va arriver à 10 000 dollars par tête. Autrement dit, 1,5 milliard de personnes. Avec quelques pays en plus, la Russie et les pays du Maghreb, vraisemblablement, on peut espérer 2 milliards. 2 plus 2 = 4 milliards sur 7,3 ou 7,4 milliards d'habitants, soit plus de 50%.

Il y aura ensuite la vague indienne, encore 1 milliard ou 1,5 milliard, avec d'autres pays et du coup on atteindra 6 milliards sur 8, à peu près 75 %.

Evidemment la dernière vague ce sera l'Afrique Subsaharienne avec d'autres pays comme l'Afghanistan, le Pakistan, le Bangladesh, le Népal, Haïti, les derniers galériens de cette planète, les pauvres parmi les pauvres, pays les moins avancés.
On se demande comment ces pays et leurs habitants pourront sortir de la misère. Le meilleur moyen serait, si ce n’est pas déjà trop tard, de développer leur agriculture à l’exemple de la Chine qui a développé son économie, c'est parce que son agriculture s'est développée avec des modes de production à l'occidentale, des exploitations quasi familiales, des baux à long terme une augmentation des prix de 50 %. Résultat en 5 ans, il y a eu 50 % d'augmentation de la production agricole et les famines ont presque disparu. Hélas, c'est pas le chemin qui a été suivi par beaucoup de pays qui ont choisi des priorités industrielles considérées comme plus modernes, comme plus novatrices.
Mais ça ne veut pas dire que le meilleur moyen de développer l'agriculture de ces pays soit de rester à 40 ou 50 % de population paysanne. Robert Reich dans ses études ne prend que 80% de la population active américaine, il exclut les fonctionnaires et les agriculteurs, donc on ne saura jamais si les agriculteurs sont des travailleurs routiniers. Je ne le crois pas.

DISCUSSION

Question : la mondialisation n'est-elle pas un phénomène qui remonte à la nuit des temps ? Deuxièmement, n’êtes vous pas un peu optimiste quant à l'enrichissement des gens et n’envisagez-vous pas une croissance démographique du monde très faible. Est ce qu'il n'y a pas quand même un risque d'explosion sociale sous-jacent à travers le monde entre les gens dits riches et les gens dits pauvres ?
P L : La mondialisation est devenue un sujet de débat, cela ne veut pas dire qu’elle n’existait auparavant. Mais à l'heure actuelle, il y a bien une généralisation progressive, une accélération par les facilités de voyages, les facilités de communications mondiales en quasi-instantanéité, la disparition progressive des droits de douane, la place grandissante les grandes entreprises mondialisées… qui me font penser que la mondialisation est quand même plus forte et plus influente dans le monde actuel qu'elle ne l'était . Les deux guerres mondiales ont brisé la mondialisation dans le passé, d’où la crise de 36. Alors la mondialisation peut être brisée dans les années qui viennent soit par une crise mondiale de l'économie, soit des conflits mondiaux
Est-ce que tout cela ne va pas finir par des explosions sociales ? Possible. C'est pour cela que notre intérêt est d'être un peu plus généreux. Si j'ai raison, le nombre les pauvres va diminuer mais cela n'empêchera pas la fracture mondiale de continuer à augmenter.

Arrêtons-nous à la démographie car on peut en dire des choses relativement nouvelles. Les démographes pensent à l'heure actuelle, c'est que nous ne sommes plus dans la période de l'explosion démographique. Le taux de renouvellement de la population, c'est un taux de fécondité des femmes de 2,1. Dans les pays développés, il n'y a plus que 2 ou 3 pays qui sont au-delà. Le taux mondial de fécondité des femmes au cours des 40 ou 50 dernières années a baissé de moitié. Il est passé d'un peu plus de 7 à un peu plus de 3,5. Si dans les années qui viennent les taux de fécondité des femmes dans les pays développés et dans les pays en développement évoluaient comme dans les 40 dernières année, il n'y aurait plus aucun habitant dans les pays développés vers 2350 et plus personne sur la terre en 2500 ! En 1990 le taux d'augmentation de la population mondiale a été au maximum, 90 millions par an., nous sommes à l’heure actuelle 75 et on va vers 60, puis vers 50, puis vers 40.
En 2050, la population mondiale plafonnera entre 8, 5 et 9 milliards et diminuera ensuite, sauf si on arrive à faire remonter le taux de fécondité des femmes.

Question: Vous avez chiffré le développement en dollars et si on le chiffrait en calories  Les calories actuellement proviennent du pétrole ou du charbon, denrées épuisables et qui augmentent le taux de CO2. Quelles énergies de remplacement peut-on envisager.
P. L. Quelles énergies pour demain ? Le pétrole n’est pas inépuisable, même si tous les ans on en découvre de nouveaux gisements et on découvre du gaz naturel. Le charbon comme le pétrole, ça pollue. Les énergies renouvelables ne semblent pas très prometteuses : les éoliennes font du bruit et dénaturent le paysage! Donc si on ne veut pas de pétrole, si on ne veut pas de charbon, si on ne veut pas de nucléaire, si on ne veut pas d'énergie renouvelable, si on veut pas de grands barrages, que faire ? A mon avis, ce ne sont pas des accords internationaux du genre Kyoto qui vont régler le problème, pour une raison simple, c'est que personne ne les appliquera, parce que l'intérêt national est toujours plus fort que la générosité et l'intelligence internationale. Donc je crois qu’il faut compter sur les progrès techniques et scientifiques pour régler de gros problèmes.

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