HISTOIRE DE LA FERTILISATION.

 15 Octobre 2010

 Joseph Marchadier

Revu et complèté en Janvier 2014 par Joseph Marchadier  et Jean Paul Prévot

Dès l’Antiquité, les agriculteurs se sont rendu compte qu’en faisant  se succéder les cultures sur une même parcelle, au bout d’un temps plus ou moins long, les rendements diminuent progressivement jusqu’à devenir quasi nuls. Au bout d’un certain temps le sol donne l’impression de se fatiguer et de s’épuiser. Si cette parcelle est abandonnée pour en cultiver une autre, le phénomène se reproduit bien sûr sur cette nouvelle parcelle. Mais si, au lieu d’aller en défricher une troisième, l’agriculteur revient cultiver la première, il s’aperçoit qu’elle a retrouvé au moins une partie de sa fertilité. Cette période de repos lui aurait-elle redonné ses forces ?

C’est pourquoi au cours des époques où la famine était un fléau récurrent, on a institué la jachère afin de lutter contre les diminutions intempestives des rendements. La jachère consistait à laisser une partie des surfaces sans culture et à profiter de cette période pour les travailler de manière à restaurer leur fertilité le plus rapidement possible. Pendant la période de  jachère, on apportait donc du fumier, on labourait fréquemment pour favoriser la germination des graines de mauvaises herbes stockées dans le sol et les détruire.

Cette pratique était pénible car elle nécessitait beaucoup de travail pour une récolte nulle.

Au cours du XIXème siècle, utilisant les connaissances nouvelles acquises en chimie, les agronomes ont cherché et trouvé le moyen d’abandonner cette pratique onéreuse grâce à une meilleure compréhension du fonctionnement du sol et des végétaux.

On découvre alors que tous les êtres vivants ont besoin de trouver les éléments nutritifs nécessaires à la formation et au développement de leurs tissus. Pour les végétaux, ces éléments nutritifs sont des sels minéraux fournis par le sol et absorbés par les racines. Lorsque les végétaux sont récoltés, les sels minéraux contenus dans les tissus de la récolte sont exportés de la parcelle. Il est donc facile d’imaginer la diminution progressive du stock de minéraux contenu dans le sol. 

Les sels minéraux utilisés par les végétaux appartiennent à trois familles. Ce sont respectivement les nitrates, les sels phosphatés, et les sels potassiques. Ce sont les principaux éléments qui feront l’objet du raisonnement de la fertilisation. D’autres éléments minéraux sont également nécessaires aux végétaux mais, en général les sols en sont suffisamment pourvus et de toute façon, ils sont consommés par les végétaux en quantités relativement faibles . Leur carence ne pose donc problème que dans des situations bien particulières.

Pour bien comprendre  ce qui se passe, il faut savoir que le sol est un milieu qui contient de nombreux organismes vivants dont le fonctionnement est extrêmement complexe. 

Il faut savoir aussi que les seules restitutions au sol dont l’agriculteur dispose sur place sont des déchets organiques : les résidus des cultures, les déjections animales (purins, fumiers etc), et éventuellement des déjections humaines.

Mais les végétaux sont incapables d’absorber les matières organiques dont les molécules sont trop peu solubles ou trop grosses pour passer à travers les parois des racines.

Nous allons donner une version simplifiée de ces mécanismes. 

  

Le sol: milieu nutritif
Comment se raisonne l'utilisation des engrais
La fertilisation est-elle polluante ?
Les engrais sont d'origine diverse
Les engrais et la qualité des produits

I/ LE SOL : MILIEU NUTRITIF.

La dynamique des éléments nutritifs du sol est très différente suivant les sels minéraux : nous distinguerons donc ici les sels contenant le phosphore et la potasse d’une part, les nitrates d’autre part.

 

A/ Le phosphore et le potassium ont une dynamique complexe.

Schématiquement, on peut dire que les racines des plantes sont en présence dans le sol de trois acteurs principaux: l’eau libre du sol qui contient les sels minéraux en solution, le complexe argilo-humique appelé aussi complexe absorbant, les micro-organismes du sol.

a/ L’eau libre, celle qui occupe les interstices du sol, contient en solution les sels minéraux. C’est elle qui véhicule les sels minéraux. Le mécanisme de l'évapotranspiration actionne en quelque sorte cette nutrition minérale, à condition que la plante soit correctement alimentée en eau, le sol constituant un réservoir plus ou moins important selonsa nature et le climat de la région.

b/ Considérons également le complexe argilo-humique comme un réservoir. Il est constitué d'une combinaison étroite de de matière organique stable (humus trés évolué) et de feuillets d'argile (qui dépendent de la nature du sol) dont la taille est inférieure à 2 microns. Le fonctionnement de cet ensemble est compliqué: il peut fixer des sels minéraux disponibles dans le sol, il peut aussi les restituer. Ce mécanisme de stockage et de restitution est réglé par différents facteurs : la nature du sol, l'histoire culturale de la parcelle, la concentration de la solution, le Ph du sol et son taux de calcium.

c/ Les micro-organismes du sol décomposent les matières organiques que le sol reçoit. Ce sont d'abord les champignons et les vers de terre qui s'attaquent aux résidus organiques, puis ce sont des organismes de plus en plus petits qui poursuivent le travail de dégradation (bactéries, levures,...) pour arriver à des composés chimiques simples. Ce processus de minéralisation enrichit l'eau libre du sol en sels minéraux solubles qui vont pouvoir être utlilisés par les racines. Si les plantes n'absorbent pas la totalité des minéraux ainsi produits, ils peuvent être fixés par le complexe argilo-humique et venir enrichir le sol. C'est pour cette raison, que contrairement à l'idée répandue qui voudrait que les rendements élevés épuisent le sol, c'est l'inverse qui se produit. En effet, l'augmentation des rendements améliore la fertilité des sols, dans le sens où ils deviennent aptes à produire davantage à cause des restitutions organiques croissantes. Plus les rendements en grains des céréales ou en racines des plantes sarclées sont élevées, plus les résidus de paille ou de feuilles qui retournent au sol sont importants et améliorent le stockage en éléments minéraux bio-disponibles

 

Ces mécanismes éclairent le fonctionnement de la jachère.

Pendant les premières années de culture d’une parcelle, les plantes absorbent les minéraux contenus dans l’eau libre du sol. Lorsque ces minéraux facilement accessibles diminuent, pour des raisons d'équilibre chimique dans le sol, le complexe argilo-humique libère une partie de ses réserves, mais relativement lentement. A ce stade, les rendements des cultures diminuent progressivement au fil des années, mais la production continue à être assurée. Puis le complexe argilo-humique se trouve épuisé à son tour : la production végétale s’effondre. 

Lorsque la parcelle est mise en jachère, les apports de fumier et les mauvaises herbes enfouies pendant plusieurs années sont décomposés par la micro flore du sol. La solution d’eau libre du sol est enrichie et les réserves du complexe argilo-humique sont reconstituées. Le sol va à ce moment pouvoir à nouveau nourrir les plantes. En l'absence d'apport d'engrais, ces mécanismes conduisent vers un nouvel équilibre associé à de rendements trés modestes (moins de 20 Qx/Ha pour le blé) connus en France jusqu'au milieu du XXème siècle.

 

B/ Les nitrates empruntent un circuit rapide.

Les nitrates sont très solubles dans l’eau libre du sol : ils suivent donc les mouvements de l’eau. Lorsqu’un engrais azoté est épandu sur le sol ou aprés une période de minéralisation trés active (sol riche en matière organique, température élevée et pluies régulières), l'azote sous forme minérale (nitrates surtout et un peu d'ammoniaque) ne reste pas stable comme le phosphore ou la potasse. Ces nitrates, s'ils ne sont pas utilisés par les plantes, peuvent être en partie réorganisés par d'autres bactéries en présence de  résidus riches en carbone. Sinon, ils resteront dissous dans l'eau et seront entrainés par elle.  Lorsque l’eau ruisselle ou s’infiltre dans le sol au-delà des zones exploitées par les racines, les nitrates sont alors perdus pour l’alimentation des plantes.

Ce phénomène peut se produire pendant l'hiver, alors que les plantes ne poussent pas donc ne consomment pas d'azote, tandis que les pluies et les chutes de neige entrainent l'eau en profondeur. Plus le sol est riche en matière organique et plus le risque est élevé. C'est pourquoi, les bonnes pratiques proposées aux agriculteurs consistent à couvrir le sol avec des cultures d'automne capables de stocker cet azote naturellement produit par la vie organique du sol. Ces avancées techniques ont été intégrées dans les obligations règlementaires imposées aux agriculteurs: la couverture végétale des sols est obligatoire en automne avec des modalités d'applications différentes selon les départements et les régions

 

 

II/ COMMENT SE RAISONNE L’UTILISATION DES ENGRAIS ?

Compte tenu de ces connaissances et de la spécificité de chaque parcelle, comment les conseillers en fertilisation proposent-ils aux agriculteurs de raisonner les apports d’engrais ?

 

A/ La fumure de fond : Le phosphore et la potasse 

Pour connaître l’état chimique d’un sol à un moment donné, l’analyse de sol est un bon moyen d’appréciation. Cette analyse se pratique sur un échantillon de sol représentatif de la parcelle. Au laboratoire, l’échantillon est traité par une solution d’acide citrique supposée dissoudre les éléments minéraux de façon comparable à l’action des racines des végétaux. On détermine alors la teneur de cette solution en phosphore et en potasse. L’analyse de sol fournit ainsi à l’agriculteur des indications sur le niveau du stock d’éléments minéraux au moment du prélèvement de l’échantillon. Le résultat s'interprète selon la nature du sol, l'histoire de la parcelle et la culture à venir. L'agriculteur saura ainsi comment choisir entre 3 stratégies :

1/ Le stock de minéraux est insuffisant : il devra alors apporter chaque année une dose de fertilisants supérieures à la part consommée par la culture pour les plantes à fortes exigences comme les plantes sarclées (betteraves, pommes de terre etc) ou juste égale à la part consommée par la culture de plantes moins exigeantes comme les céréales.

2/ Le stock de minéraux est convenable : il peut se contenter de compenser chaque année par la fumure la part des prélèvements effectués par la culture en effectuant de préférence ces apports avant la culture des plantes exigeantes.

3/ Le stock de minéraux est pléthorique : il peut alors apporter une fumure faible, voire ne rien apporter pendant quelques années lorsqu'il cultive des plantes peu exigeantes.

L’objectif de cette démarche vise à obtenir un rendement optimal pour l’ensemble des cultures de la rotation, avec un minimum de dépenses en engrais et en s’écartant de la pratique qui consistait systématiquement à enrichir son sol comme c’était le cas il y a 30 ou 40 ans. La richesse intrinsèque d’un sol en l’un ou l’autre élément n’a pas grande signification. Elle dépend de la culture envisagée, en effet, un sol peut être considéré comme bien pourvu pour une plante comme le blé et insuffisamment pour une autre exigeante comme la betterave ou la pomme de terre. En général, les cultures à cycle court pouvant produire un important volume de végétation doivent trouver de grosses quantités de nutriments dans la solution du sol, ce qui explique en partie leur exigence par rapport à la biodisponibilité des éléments. Enfin, il ne faut pas confondre : besoins élevés pour croître et niveau des exportations en éléments minéraux. Une betterave peut mobiliser jusqu’à 900 kg de potasse à l’hectare pendant sa croissance, alors qu’un blé ne dépassera pas 90 kg, mais l’essentiel de cette potasse retournera au sol sous forme organique soit dans les feuilles de la betterave, soit dans la paille de blé ou les fumiers (référence nouvelles normes COMIFER 2009 – Arvalis - Institut du végétal).

B/ Le nitrates font bande à part

Le raisonnement de la fumure azotée est sensiblement différent en raison du risque d'entrainement des nitrates pendant l'hiver. Ce n’est qu’au cours des années 1970 qu’il a pu être proposé aux agriculteurs. Prenons l’exemple du blé.

Les besoins du blé en azote se situent essentiellement pendant sa période de développement végétatif, c’est à dire entre le tallage en Février Mars et l’épiaison en Mai. Or, durant cette période, l’azote disponible pour la culture est rare, car  les pratiques culturales recherchent le moins d’azote minéral possible dans le sol pendant l’hiver exposé aux risques de lessivage. De plus, les fournitures d’azote par le sol ne sont pas encore amorcées en raison des températures encore faibles. Il va falloir apporter une certaine quantité d’engrais à la culture en suivant un raisonnement basé sur un bilan précis.

Le raisonnement consiste à évaluer la teneur du sol en nitrates en fin d’hiver. En effet, les fermentations du sol produisent des nitrates. Cette production est fonction entre autres de l’humidité, de la température et de la quantité de matière organique apportée au sol en automne, soit par les résidus de la récolte précédente, soit par des apports extérieurs (fumier, boues industrielles). Une analyse du sol au printemps permet une bonne mesure des reliquats de fin d’hiver.

 

Pour un rendement donné, on connaît les besoins en azote du blé. L’agriculteur fait donc une estimation du rendement espéré et il peut calculer ainsi la dose de nitrate qu’il doit apporter en complément de la fourniture du sol. Cette dose est parfois très réduite. Il n’y a donc pas de conseil unique. D’ailleurs, la réglementation impose désormais à tous les agriculteurs de faire ce calcul et de le tenir à la disposition des contrôleurs : le bilan prévisionnel de fumure et les justificatifs des achats d’engrais ou la composition des produits organiques utilisés et même les arguments techniques en cas de modification de ce bilan prévisionnel.

Les nitrates seront apportés en deux ou trois fois de façon à faire coïncider le mieux possible les quantités disponibles avec les besoins du blé. Car les quantités non utilisées représentent un coût inutile pour l’agriculteur et peuvent augmenter certains risques comme la verse ou sensibiliser la culture à certaines maladies du feuillage, sans compter la fuite des nitrates vers des horizons non accessibles aux racines. Le blé peut s’enraciner à plus de1 mètre de profondeur, pendant sa croissance au printemps.

 

III/ LA FERTILISATION EST-ELLE POLLUANTE ?

 

Depuis la fin des années 1980, la Société est devenue de plus en plus exigeante en terme de pollution. Les engrais phosphatés et potassiques sont très peu polluants. Ils sont fixés par le complexe absorbant du sol et ne sont pas entrainés par les eaux d’infiltration. En revanche, nous avons vu que les nitrates sont très solubles et suivent l’eau dans le sol. Bien que la toxicité des nitrates soit très inférieure à ce qui a été craint dans les années 1980, il reste que la teneur de l’eau de consommation est règlementée et ne doit pas dépasser 50mg/litre. Cette contrainte a fait que les agriculteurs ont cherché à maîtriser de mieux en mieux la fertilisation azotée. Ces recherches vont également dans le sens de leur propre intérêt puisque les nitrates non utilisés sont perdus pour les plantes qu’ils cultivent.

Il est beaucoup plus facile de gérer la fertilisation avec des engrais chimiques qu’avec des fumures organiques car les processus de minéralisation sont tributaires du climat. On en voit l'illustration dans les difficultés de maîtrise des excédents quand les épandages sont trop abondants par rapport aux surfaces disponibles, ce qui était le cas structurellement au Danemark, en Hollande ou localement en Bretagne. L’agriculture a toujours eu un rôle de recyclage des effluents organiques, mais à condition que cela soit réalisé de façon rationnelle. Enfin, il faut noter que les phénomènes d’eutrophisation (ceux qui se traduisent localement par des proliférations d’algues vertes) sont dus à la conjonction de 3 facteurs : la présence de nitrates + des phosphates (ils proviennent de lisiers de porcs mal gérés par exemple, mais aussi des lessives rejetées dans les eaux usées ménagères) + un certain réchauffement des eaux de surface (évolution du climat).

De nouveaux procédés de diagnostic et d’épandage sont en permanence à l’étude pour régler au mieux les apports.

Bien avant qu’apparaisse le jaunissement de la végétation, signe d’une faim d’azote, on peut détecter les prémisses de cette faim en analysant, dans les longueurs d'onde de l'infra-rouge, le rayonnement renvoyé par les végétaux. Des capteurs sensibles à ce rayonnement sont placés sur l’épandeur d’engrais et règlent le débit de l’épandage en fonction des besoins des plantes qui se trouvent immédiatement devant le tracteur. Cet indicateur de nutrition peut également être obtenu par des images satellitaires à des moments clés de la culture et le conseil adressé sous forme de cartes à l’agriculteur qui adhère à ce service (Ex : Farmstar service proposé par ARVALIS).

Plus sensible encore : lorsqu’un végétal commence à manquer d’azote, certains de ses gènes entrent en activité avant tout signe extérieur de faim. Il suffit de verser du jus de plante sur une grille de réactifs pour détecter l’activité de tel ou tel gène et connaître l’état nutritionnel de la plante: c’est la puce à ADN. Ce diagnostic pourra bientôt être réalisé dans le champ.

Le problème de l’alimentation azotée ne se pose pas pour certains végétaux, comme les légumineuses (pois, haricot, luzerne, …) qui ont la particularité de vivre en symbiose avec certaines bactéries du sol qui ont la propriété de fixer l’azote atmosphérique qui assurent ainsi leur nutrition azotée (rappelons que l’atmosphère est constitué à 78 % d’azote, 21 % d’oxygène et des gaz rares). Or, il est de plus en plus raisonnable d’espérer qu’un jour, le travail des généticiens permettra de rendre certains végétaux cultivés aptes à fixer l’azote de l’air comme les légumineuses. Les épandages d’engrais azotés de synthèse pourront alors être supprimés ou, au moins, considérablement diminués.

Seuls les apports en phosphore et potasse resteront alors nécessaires.

 

IV/ LES ENGRAIS SONT D'ORIGINE DIVERSE

A/ Les engrais minéraux

 

Les engrais utilisés en agriculture sont pour la plupart d’origine minière : Les potasses autrefois exploitées en Alsace, le sont aujourd’hui au Canada, en Allemagne, en Russie elles  sont utilisables en l’état après séparation généralement du chlorure de sodium qui est associé. Les phosphates d’Afrique du Nord , de Caroline du Nord (USA), de Chine ou Jordanie, sont utilisés après un traitement industriel qui les rend solubles.
 
Les engrais azotés provenaient également d’extraction minière comme les nitrates de soude (salpêtre) du Chili et exploités dès le milieu du XIXème siècle, mais maintenant ils sont surtout issus de synthèse chimique telle que l’ammonitrate, très largement utilisé .Le procédé utilise l’azote atmosphérique qui est inépuisable, et l’hydrogène du gaz naturel. Cette synthèse est très gourmande en énergie et des progrès sont attendus dans le rendement des procédés industriels.

Ces engrais sont très utilisés car ils sont relativement solubles : ils peuvent donc être utilisés rapidement voire même immédiatement par les plantes.

B/ Les engrais organiques

Ce sont principalement les déchets issus de l’exploitation agricole : fumiers, lisiers, résidus de culture laissés sur le champ, etc…

On peut utiliser également les résidus d’autres activités : boues industrielles, boues de station d’épuration, etc… moyennant quelques précautions pour éviter une trop grande concentration de métaux lourds ou autres éléments toxiques. Afin de préserver la qualité des sols et des productions agricoles, les épandages de résidus industriels ou urbains sont très encadrés par la réglementation qui impose des analyses des produits et un suivi des surfaces les recevant.

 

L’agriculture biologique s’interdit l’utilisation d’engrais de synthèse, ce qui réduit l’usage des fertilisants à des produits soit organiques eux même issus d’agriculture biologique soit des produits naturels comme les phosphates naturels qui n’ont quasiment aucune efficacité nutritionnelle à court terme pour les plantes de grandes cultures (il faut trouver des substituts organiques riches en phosphore), par contre le potassium ne pose pas de problème dans ce système de production. La satisfaction des besoins en azote des plantes, et en particulier des graminées est dans ce cas beaucoup plus difficile à raisonner et à maîtriser. En effet, les nitrates nécessaires à la plante ne peuvent alors venir que de la décomposition des matières organiques : il devient très problématique de faire coïncider les besoins des plantes et la disponibilité en nitrates. Surtout pour des plantes comme le blé dont le départ en végétation se fait très tôt au printemps alors que l’activité biologique de décomposition des matières organiques du sol est ralentie du fait des températures encore basses. Lorsque le sol va se réchauffer, les nitrates vont devenir disponibles, mais pour le blé ce sera un peu tard par rapport au cycle de la culture. Cette contrainte, en système bio. rend délicat l’équilibre du bilan avec le risque d’excédent d’azote comme celui d’une faim au cours 'une même campagne. Enfin, quel que soit le système de culture, la pratique régulière de fumures organiques tendant à augmenter fortement les teneurs dans les sols et par voie de conséquence la minéralisation d’automne augmente également avec le risque de lessivage hivernal.

 

V/ LES ENGRAIS ET LA QUALITÉ DES PRODUITS

 

A l’heure où la Société s’interroge sur les répercutions sanitaires et organoleptiques des pratiques agricoles, que faut-il penser de l’impact des engrais sur la qualité du produit final ? 

Débarrassons-nous d’abord d’une idée reçue selon laquelle on "force" les cultures avec des engrais. Il n’est pas possible de « forcer » une plante. On ne peut que lui fournir les différents éléments favorables à sa croissance. 

Elle consomme les éléments nutritifs qu’il lui faut et elle laisse le reste.

En présence d’un excès d’engrais azoté, le comportement des plantes est un peu différent. Un léger excès se traduit par une augmentation de la teneur en azote de la plante, un excès plus important entraine des inconvénients pour l’agriculteur : verse des céréales et plus grande sensibilité à ceraines maladies; si la dose d’engrais azoté est trop importante, plusieurs fois la dose normale, la végétation est détruite : elle ne sera donc pas consommée. Personne n’a intérêt à une telle pratique.

 

Examinons seulement le cas d’une utilisation normale des engrais .

Il est clair qu’une culture normalement fertilisée n’a pas le même aspect ni la même composition chimique qu’une culture qui a connu la faim. 

Néanmoins, il n’est pas possible d’avoir un avis général en matière de fertilisation pour toutes les cultures. Les incidences de la fertilisation sont en effet très différentes suivant les cas. Prenons quelques exemples :

- dans le cas de la vigne, la fertilisation doit être limitée car les rendements importants ne riment pas avec qualité. La vigne doit en effet souffrir un peu pour donner une production de qualité. C'est d'ailleurs une culture adaptée aux sols squelettiques, c'est à dire aux réserves en eau faibles.

- dans le cas des fruits et légumes, une fertilisation trop généreuse entraine une diminution du goût et peut provoquer une plus grande sensibilité des plantes aux maladies nécessitant des traitements supplémentaires.

- dans le cas des céréales, à part l'orge de brasserie dont les grains doivent rester relativement pauvres en azote, les excès modérés d’engrais ont peu ou pas de répercussion sur la qualité des produits. Ils peuvent tout au plus rendre la récolte plus difficile lorsque cet excès à provoqué la verse. Par contre, un déficit en azote compromet la valeur boulangère du blé et diminue la valeur nutritive de toutes les céréales pour l'alimentation animale. Les tests de dégustation, réalisés en aveugle, n’ont pas mis en évidence de différences gustatives entre une farine bio et une farine conventionnelle, seul le processus de boulangerie peut introduire des différences.

Dans tous les cas, il n’a jamais été possible de mettre en évidence un lien entre la fertilisation azotée et la santé des consommateurs.

Enfin, une plante ne fait pas de différence entre un nitrate issu d’un apport d’engrais de synthèse et un nitrate issu de la minéralisation de la matière organique du sol, seul le bon dosage de cet apport importe.

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